Ruche Leroy, Types de
ruches
Les vieilles maisons de famille renferment souvent des vrais
petits trésors. Cela vaut bien sûr pour le matériel apicole qui a connu un
certain nombre de révolutions au cours des décennies passées. Toutes les
techniques utilisées par nos parents comme les ruches en paille hémisphériques
ont fait place aux ruches divisibles à cadres en bois (voire en plastique). De
même tout le matériel de travail du miel a vu l’arrivée progressive de l’acier
inoxydable.
Mais on n’avait pas toujours le cœur à jeter le matériel qui
avait rendu de bons services, alors on le rangeait à la cave ou au grenier en
pensant qu’un jour peut-être il pourrait reprendre du service.
J’ai pu vérifier cela il y a peu de temps en allant visiter
des amis du côté de Soissons. Mon hôte connaissait mon intérêt pour
l’apiculture et il me proposa d’aller rechercher une ruche qu’il avait vue
quelque part dans la maison.
Nous voilà donc partis à la recherche de l’objet, mais les morceaux étaient éparpillés et il a fallu un peu de temps pour rassembler le puzzle.
Nous voilà donc partis à la recherche de l’objet, mais les morceaux étaient éparpillés et il a fallu un peu de temps pour rassembler le puzzle.
Finalement nous avons pu reconstituer la ruche avec son
plancher son corps rond, son chapiteau conique et sa capuche de paille. Le corps comme le toit portaient les mentions suivantes.
Ces indications jointes à l’aide précieuse des moteurs de
recherche Internet me permirent de remonter à Rodolphe LEROY qui écrivit en
1946 un livre intitulé « Les abeilles et la ruche mixte » (voir photo 3) où il
expliquait la conception de sa ruche mixte et sa vision de l’apiculture. La
ruche se compose de plusieurs éléments facilement séparables les uns des
autres. C’est tout d’abord un plancher en bois à deux entrées avec une rigole
joignant l’une à l’autre. Puis vient un corps de ruche cylindrique appelé aussi
« chambre à couvain » aux dimensions suivantes : diamètre intérieur 40 cm,
hauteur 33 cm avec des parois de 5 cm d’épaisseur.
Comme on peut l’observer, ces parois sont
formées de 2 feuilles de peuplier déroulé qui maintiennent de la paille pressée
non écrasée placée verticalement avec, à intervalle régulier, des renforts de
bois, le tout étant cerclé de quelques solides fils de fer (ici à peine
rouillés).
La partie supérieure de ce nid à couvain est fermé par un
plafond dans lequel est pratiqué une ouverture carrée munie de barrettes
triangulaires sur lesquelles les abeilles fixent leurs rayons. Cette ouverture
offre en outre une découpe aux mesures de la hausse qui peut être intercalée
entre le corps et le chapiteau au moment des fortes miellées.
L’idée de R. Leroy est que les paniers en paille tressée et
de section circulaire offrent aux abeilles l’habitat idéal tant sur le plan du
développement de la colonie que de son hygiène y compris pendant la période
d’hivernage. Sur ce corps s’adapte un chapiteau prolongé par une poignée de
bois. Il est creux et muni de deux croisillons car il est destiné à recevoir
des provisions de miel
En effet, ce dôme est une sorte de magasin additionnel où les
abeilles peuvent entreposer environ 5 kg de miel constituant ainsi une réserve
permanente. Au-dessus de ce dôme une capuche de longues fibres de paille vient
s’adapter comme un toit de chaume afin de renforcer l’étanchéité hydrique et thermique.
Photos 4 et 5 : quelques détails de la ruche : le plancher
avec ses deux ouvertures et sa rigole, le remplissage de paille, les armatures
en bois et en fil de fer, l’ouverture carrée du plafond et l’intérieur du
chapiteau avec ses croisillons.
Cependant, au regard de la littérature, il manque deux pièces
importantes à la ruche de mon ami. Pour renforcer la solidité des rayons
construits dans le corps de ruche, quatre croisillons en bois disposés en deux
croix opposées étaient fixés, l’un au tiers supérieur et l’autre au tiers
inférieur du cylindre. Chacun des croisillons prenait appui sur l’intersection
formée par les armatures et les cerceaux métalliques.
Par ailleurs, nous n’avons pas retrouvé de hausse qui pouvait
s’intercaler entre le corps et le chapiteau (voir dessin ci-contre). Cependant
R. Leroy explique que les hausses utilisées étaient de section carrée (31 cm x
31 cm) avec une hauteur de 18,5 ou 13,5 cm selon les cas chacune comprenant
huit cadres de type Layens. Une fois la miellée terminée et la hausse retirée,
le dôme avec sa provision de miel additionnelle était replacé sur le corps de
la ruche en vue de l’hivernage.
Au-delà du côté sympathique et amical de cette reconstitution
d’une ruche mixte, on peut souligner quelques points intéressants des
observations de Rodolphe Leroy à propos de sa ruche :
Selon lui, le choix des matériaux comme le bois et la paille
(il parle aussi dans son livre de fibrociment dont on sait qu’il contient de
l’amiante) et des formes (ronde, cylindrique, en cloche) respecteraient le
mieux les colonies d’abeilles,
la volonté de ne pas imposer pour le nid à couvain la
structure rigide des caisses carrées ou rectangulaires et des cadres, mais
plutôt de favoriser une construction naturelle des rayons.
Avant de placer la première hausse, il fallait assurer un
minimum de provisions soit pour les périodes de disette ou pour les longs mois
d’hiver, et le chapiteau était la façon originale de répondre à cette question
sans avoir recours aux nourrissements au sucre.
La hausse mobile avait été astucieusement intégrée à
l’ensemble afin de permettre aux apiculteurs un travail de récolte du miel plus
aisé avec l’emploi d’un extracteur et de ce fait la possibilité de travailler
un plus grand nombre de colonies. Cela permettait en outre le réemploi des
cadres déjà façonnés au printemps suivant « donnant ainsi aux abeilles une
avance considérable leur permettant de passer immédiatement à l’emmagasinement
du miel, au lieu de dépenser le plus précieux de leurs efforts à construire de
nouveaux rayons ».
On retrouve donc dans cette pratique de la ruche mixte
(combinaison de fixité et de mobilité) un besoin de favoriser un développement
le plus naturel (écologique ?) possible comme c’est le cas avec la ruche Warré
par exemple. Mais à cette époque il n’était pas question de Varroa destructor
et de ses ravages dans les ruchers. Il est vrai aussi que de nos jours, la «
divisibilité » des ruches favorise une meilleure préparation et surtout une
meilleure surveillance des colonies.
Thierry Duroselle
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