samedi 21 décembre 2019

Et si on hébergeait des abeilles solitaires ?



Qui sont les abeilles solitaires ?
Au début, j’ai eu peur. Je me suis dit « Ouille, elle va rameuter tout un essaim, et j’ai beau aimer les abeilles, je n’ai pas forcément envie de les avoir juste à côté de ma fenêtre… Pour moi et aussi pour elles (risque qu’elles rentrent dans l’appartement et s’enferment à l’intérieur…)
Ce n’est qu’ensuite que j’ai appris à connaître cette abeille. Il s’agissait d’une abeille solitaire. Contrairement aux abeilles sociales, qui vivent en essaim, les abeilles solitaires, ou abeilles sauvages sont… solitaires !
90 % des abeilles sauvages n’ont pas de reine. Elles sont dites solitaires.
Il existe des centaines d’espèces d’abeilles solitaires ! Plus ou moins grandes et velues, de couleurs variées…
Voici les principales abeilles solitaires que nous rencontrons dans le jardin.



La megachile : abeille tapissière
Megachile est un genre très vaste, qui regroupe le plus grand nombre d’espèce. Elle se distingue par ses fortes mandibules, qui lui permettent de découper des feuilles pour constituer son nid. Son thorax est brun et velu, et sa partie inférieure rayée de noir. Les agriculteurs l’invitent à polliniser les champs de luzerne.

L’Osmie (osmia) : abeille maçonne

L’Osmie est une espèce du genre Megachile. C’est l’une des premières de la saison à apparaître (début mars). Elle pollinisera les premiers arbres fruitiers bien avant que les abeilles sociales ne se réveillent ! On la reconnaît à son corps trapu et velu, roux orangé strié de noir. L’abeille maçonne est-elle dangereuse ? Non, elle ne piquera que si elle est réellement en danger de mort, en dernier recours pour s’échapper d’une situation désespérée… N’oubliez pas que pour les abeilles, piquer équivaut à une mort quasi-certaine dans les heures qui suivent.

La Xylocopa violacea : abeille charpentière
Elle se réveille également très tôt dans la saison. On la reconnaît à son corps massif, noir bleuté. Elle pollinise les arbres fruitiers, les légumes mais également les arbustes.



L’andrène, abeille terricole
Toutes les abeilles ne nichent pas en aérien. Certaines habitent… dans la terre ! Sans être organisées en ruche, elles vivent en communauté souterraine, comme un petit village où chacune aurait sa maison. Un « tapis d’abeilles » (c’est le terme officiel) peut rassembler plus de 1000 individus sur un mètre carré ! C’est très impressionnant, mais inoffensif. Elles sortent en avril quand les températures se radoucissent et vivent jusqu’à juin.



Quel est leur rôle dans la pollinisation ?
Elles contribuent tout autant que leurs consœurs à la pollinisation, et sont libres de tout engagement : elles ne sont pas élevées par des agriculteurs pour produire le miel (comme les abeilles dites « domestiques », Apis mellifera).
Certaines fleurs ne sont pollinisées que par les abeilles solitaires, par exemple, l’orchidée ophrys abeille qui n’est fécondée que par l’eucère, une abeille à longues antennes qui est la seule à se laisser duper par la ressemblance de la fleur avec une abeille.
Elles ont un rôle complémentaire aux abeilles domestiques.

En quelle saison peut-on les croiser ?
Elles butinent dès le mois de mars (et permettent donc la pollinisation des arbres fruitiers) car elles supportent mieux les basses températures. Le gros de leur travail est fini en mai.
Cependant, certaines races d’abeilles solitaires se regroupes sous forme d’essaim pour les Andrena et Colletes) pour se reproduire. Cette période dure quelques semaines au printemps. Le plus simple est alors de les laisser tranquilles !

Les abeilles solitaires sont-elles dangereuses ?
Non, comme leurs cousines, les abeilles solitaires n’attaquent que lorsqu’elles sont agressées.
Si l’on devait décrire leur personnalité (au risque d’être anthropomorphique) les solitaires sont même plus sympathiques et plus peureuses.
Il faut plutôt les voir comme des mères célibataires de famille nombreuses, qui font des aller-retour pour nourrir leur progéniture jusqu’à ce qu’elle sont indépendante… pas le genre à vous chercher des noises !
Elles n’ont pas d’esprit de ruche, elles n’ont donc pas d’instinct de sacrifice pour protéger la ruche, l’essaim ou le miel.
En outre, le dard des abeilles reste dans le peau lorsqu’elles piquent, arrachant une partie de l’abdomen et entraînant en général leur mort quelques heures plus tard. C’est pourquoi une abeille solitaire n’attaquera jamais spontanément : ce serait mettre en péril sa lignée dont elle est la seule à s’occuper.
Pour les abeilles solitaires, la sélection naturelle fait son travail et réduit les chances de survie des abeilles les plus agressives… Ce ne sont pas des guêpes !

Produisent-elles du miel ?
Non… Leur principale activité est de construire un nid, d’y pondre, et d’y stocker de la nourriture pour les larves. Chaque grain de pollen est destiné aux larves.

Quel est le cycle de vie de l’abeille solitaire ?
L’abeille solitaire cherche des petites cavités pour pondre leurs œufs. Ce peut être de petites galeries formées par une cheville dans une poutre, un trou dans du bois mort, des trous d’aération de fenêtre… Certaines espèces sont capables de creuser elles-mêmes leurs nids, dans le sol, le bois tendre.
Une fois la galerie repérée ou creusée pour la nidification, l’abeille solitaire y pond une petite dizaine d’œufs. Pour chaque œuf, elle dépose du pollen, de petits insectes et autres nourritures pour les futures larves, puis elle colmate le trou pour créer une loge fermée avant de pondre un autre œuf, et ainsi de suite le long de la galerie. On ne voit en général que le dernier « bouchon », mais il cache un véritable hôtel !
Cet hôtel passera tout l’hiver fermé, puis, au printemps suivant, les abeilles auront terminé leur développement larvaire et seront prêtes à sortir.
La valeureuse abeille qui a pondu ne verra donc jamais ses enfants voler… Une abeille solitaire femelle vit en général 2 à 10 semaines, et un mâle… moins d’une semaine.

L’abeille solitaire est une héroïne silencieuse de nos jardins !
L’abeille solitaire porte seule la responsabilité de la survie d’une dizaine de nouvelles abeilles : aidons-là !
Si elle ne produit pas de miel, cela ne signifie pas pour autant que son apport à la nature est nul : on estime à 1,5 milliards d’euros par an la valeur qu’apporte la pollinisation par les insectes… rien que pour la France ! En réalité, le service qu’elles apportent à l’humanité n’est pas quantifiable.

Qu’est-ce qui attire les abeilles ? Les fleurs bien sûr, mais aussi les abris.
Un hôtel à abeilles solitaires (et autres insectes) permet de leur fournir le cadre idéal pour s’installer. Vous pouvez le fabriquer vous-même ou en acheter un tout prêt.
Parmi les hôtels à insectes, les nichoirs à abeilles solitaires sont spécifiquement adaptés à leurs besoins. L’abri est constitué de cavités creuses de diamètre adapté à la ponte des abeilles solitaires. Les parois des cavités sont lisses (important pour ne pas déchirer leurs ailes).

Comment attirer les abeilles solitaires ? Où le positionner pour attirer les abeilles ?
Lorsque les abeilles sont à la recherche d’un endroit pour pondre, elles fouillent partout !
Il est néanmoins conseillé d’installer votre hôtel à insectes : à environ 1,5 mètre de haut, dos au vent, à l’abri de la pluie si possible avec la face « entrée » vers le sud ou le sud-ouest
À la bonne saison, les premières abeilles arriveront dans les 24/48 heures. Vous les verrez faire des aller-retour et commencer à remplir quelques compartiments !

Héberger des abeilles solitaires apporte-t-il des nuisances ?
Les abeilles arrivent une à une, et repartent dès que leur tâche est terminée. Quand à l’éclosion, vous ne craignez rien : les abeilles nouvellement nées se contentent de sortir et de faire votre vie ailleurs.

Vous ne risquez pas d’avoir une ruche, ni une colonie entière d’abeilles « Tanguy » qui n’osent quitter le domicile !
Un abri pour abeilles permet justement de diminuer les nuisances !
Face à la diminution de leurs habitats préférés, les abeilles se tournent vers des alternatives moins heureuses :
Trous d’aération de fenêtre
Bois tendre d’une maison
Trous de chevilles (comme cela a été mon cas)
Mobilier de jardin
Prises électriques !
Leur proposer un habitat adapté, c’est aussi leur donner la possibilité de vous laisser tranquille !

En conclusion
Les abeilles solitaires ne produisent pas de miel. Les agriculteurs ont peu d’incitation à les aider. Elles voient leur habitat naturel se raréfier mais jouent pourtant un rôle crucial dans la pollinisation et la biodiversité.
Si vous avez la place d’installer une maison à insectes dans le jardin, n’hésitez pas une seconde !






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